Laurence Dessauger
Directrice de l’Institut des Métiers et des Compétences
CFA du groupe Randstad France
Les Centres de Formation d’Apprentis (CFA) jouent un rôle majeur dans l’écosystème de la formation professionnelle en France. Chaque année, ils ouvrent la voie vers l’acquisition de nouvelles compétences et l’accès à l’emploi à des dizaines de milliers d’apprentis. Des jeunes qui n’auraient pas pu, sans le salaire qu’offre la formation en alternance, financer leurs études, acquièrent un diplôme et une expertise professionnelle.
La loi de 2018 sur la liberté de choisir son avenir professionnel visait à rendre l’apprentissage plus attractif et accessible, notamment en assouplissant les conditions d’âge (de 16 à 29 ans, contre 25 auparavant), en libéralisant l’ouverture de CFA et en incitant financièrement les entreprises à recruter des apprentis. Et elle y est parvenue. L’apprentissage est désormais perçu comme un parcours valorisant, y compris pour des formations de niveau supérieur. Le développement de filières d’apprentissage jusqu’au niveau Master a permis d’attirer des profils plus variés. L’apprentissage est aujourd’hui reconnu comme un parcours d’excellence, aussi bien par les candidats que par les entreprises.
850 000 nouveaux contrats d’apprentissage ont été signés en 2023 dans les secteurs public et privé, en hausse de 2% par rapport à 2022. L’augmentation du nombre de contrats concerne tous les niveaux de diplôme, et les formations du supérieur connaissent aujourd’hui le plus fort développement. Jusqu’à quand ?
Dans un contexte de rationalisation budgétaire, des ajustements sur les niveaux de prise en charge (NPEC) des contrats d’apprentissage, déjà amorcés en 2022 et 2023, pourraient se poursuivre. Par ailleurs, le gouvernement étudie actuellement le montant des aides allouées aux entreprises, avec d’autres mesures visant à garantir la qualité des formations et à limiter les ruptures de contrat. Le rapport “régulation financière des Centres de Formation d’Apprentis” de l’IGAS, publié en juillet 2024, propose une série de mesures pour revoir les modalités de financement des CFA.
Face aux mutations technologiques, à la transition écologique et à l’évolution démographique, le maintien d’une politique publique ambitieuse en faveur de la formation est pourtant une nécessité. L’adaptation rapide de la main-d’œuvre aux évolutions du marché du travail sera l’une des clés pour garantir une insertion professionnelle durable et maintenir le plus grand nombre possible de personnes en emploi.
Dans cette perspective, les CFA jouent un rôle central. En accompagnant les jeunes et en leur offrant une formation professionnalisante, les CFA permettent de répondre aux besoins immédiats des entreprises tout en préparant leurs étudiants aux défis à venir. Sanctuariser les moyens qui leur sont alloués, c’est investir dans un outil stratégique capable de soutenir notre économie tout en favorisant le lien social. Cela est particulièrement vrai pour les jeunes en marge du système (les NEETs – jeunes ni en emploi, ni en études, ni en formation), pour qui l’apprentissage peut être une formidable opportunité de réinsertion.
Chez Randstad, voilà près de 20 ans que nous promouvons la formation en alternance et le contrat d’apprentissage intérimaire, qui n’apparaît aujourd’hui dans aucune des statistiques liées à l’alternance. L’Institut des Métiers et des Compétences a été créé dès 2005, avec un statut associatif qu’il a conservé lors de son passage en CFA d’entreprise en 2020. Implantés au cœur de la Seine-Saint-Denis, nous formons quelque 650 alternants chaque année, avec un taux de réussite de 78% en 2024 et une offre jusqu’à présent principalement axée sur des parcours post-bac dans le secteur tertiaire.
Notre ambition, depuis l’origine, est de répondre au mieux aux besoins de compétences des entreprises qui confient leurs recrutements à Randstad. C’est pourquoi nous poursuivons notre développement à travers deux évolutions : la création de CFA « hors-les-murs », en appui sur des organismes de formation partenaires, et de nouvelles formations sur les premiers niveaux de qualification dans des métiers techniques actuellement en tension, comme celui de conducteur d’installations et de machines automatisées, ou celui de technicien de production industrielle. Une offre sur mesure, qui vient combler une attente réelle des bassins d’emploi locaux. Bordeaux, Aix-en-Provence et la Normandie seront les premiers territoires concernés.
Oui, l’apprentissage est un levier intelligent de démocratisation de l’accès à la formation et un tremplin efficace vers l’emploi pour des dizaines de milliers de jeunes dans notre pays. Permettons-lui de remplir pleinement son rôle en sécurisant son financement par un maintien des aides aux entreprises et des NPEC (Niveau de Prise En Charge des contrats d’Apprentissage) adaptés.