Après deux ans de crise sanitaire, les collectivités locales semblent avoir réussi à maintenir, et même améliorer, le climat social au sein de leurs équipes. Elles ont porté leur attention sur les conditions d’exercice de leurs agents et ont proposé des accords portant notamment sur le télétravail ou la revalorisation des salaires. Pour la seconde partie de l’année 2022, maintenir la cohésion des équipes reste un enjeu majeur pour 90% des responsables de collectivités interrogés. Parallèlement, les difficultés de recrutement s’intensifient et la concurrence avec le secteur privé s’accroît. Parvenir à recruter sur des postes et des profils en tension est la priorité de 89% des dirigeants qui doivent résoudre l’équation suivante : maîtriser les dépenses de personnel en période d’inflation tout en continuant à attirer de nouveaux talents. La mission de service public n’est pas oubliée pour autant et la priorité, pour 88 % des collectivités dans les deux ans à venir, est donnée aux actions menées en faveur des publics les plus fragiles.
60% des collectivités locales rencontrent des difficultés de recrutement et doivent investir pour améliorer leur attractivité
La concurrence avec le secteur privé s’intensifie sur les métiers en tension
Les collectivités locales doivent relever un double défi : augmenter les rémunérations tout en contenant les dépenses de fonctionnement
Le télétravail et l’équilibre vie privée/vie professionnelle sont des éléments d’attractivité à renforcer
Le Baromètre RH 2022 des collectivités locales, réalisé par le Pôle public du groupe Randstad France, en partenariat avec Villes de France, Intercommunalités de France, l’ANDRHDT, l’ADGCF, le SNDGCT et la Gazette des Communes, met en lumière ces priorités RH à court, moyen et long terme.
Un climat social plus apaisé
Après le pic de morosité relevé en 2021, l’optimisme revient doucement mais sûrement : 50% des personnes interrogées estiment que le climat social est resté stable ( + 5 points par rapport à 2021) et 12% trouvent qu’il s’est amélioré – ce taux s’élève même à 18% chez les DGS/DGA.
L’absentéisme est quant à lui en baisse sensible : seulement 41% des collectivités interrogées déclarent avoir rencontré d’importantes difficultés d’organisation pour ce motif, contre 74 % en 2021. C’est principalement dans les filières techniques que les difficultés se sont fait sentir au premier semestre 2022.
Un dégel du point d’indice qui renforce l’attractivité mais rend difficile la maîtrise de la masse salariale
La revalorisation du point d’indice des agents exerçant au sein des fonctions publiques s’est concrétisée lors d’une conférence salariale tenue le 28 juin 2022. La valeur de ce point, qui constitue le socle commun du calcul des salaires bruts, n’avait pas été révisée depuis 2017. En réponse à la conjoncture inflationniste et à l’indexation du salaire minimum sur la hausse des prix, un certain nombre d’employeurs territoriaux avait, dès le début de l’année, soutenu le pouvoir d’achat de leurs personnels via le régime indemnitaire.
Si la revalorisation du point d’indice constitue un facteur indéniable de satisfaction et d’attractivité, maîtriser la masse salariale est toujours un enjeu stratégique majeur à 24 mois pour 92% des Dirigeants.
Les trois principaux leviers à actionner pour contrôler la masse salariale restent la mutualisation des fonctions (37%) et des services (28%), la révision du temps de travail et la maîtrise de l’absentéisme.
Au regard des nécessités de contenir la masse salariale tout en soutenant le pouvoir d’achat et des difficultés de recrutement de plus en plus prégnantes, cette dynamique d’apaisement du climat social et d’attention portée aux conditions d’exercice des missions revêt d’autant plus d’importance. La qualité de vie au travail et la prévention des risques sont ainsi prioritaires pour 77% des répondants, notamment dans les communes de taille moyenne (85%).
Des projections d’effectifs qui augmentent mais des difficultés de recrutement au plus haut
Amorcée en 2019, la tendance à une augmentation des effectifs se confirme pour la quatrième année. 34% des collectivités vont augmenter leurs effectifs et seulement 15% les diminuer. Les prévisions d’augmentation sont plus marquées dans les EPCI (56%) et les Conseils départementaux et régionaux (44%).
Pour 41% des répondants (vs 22% en 2021), le recrutement fait donc naturellement partie des enjeux RH stratégiques d’ici la fin du mandat, notamment pour plus de la moitié (55%) des Conseils départementaux et régionaux.
Dans le même temps, l’intérêt pour les carrières territoriales, longtemps porté par l’attrait pour des emplois de proximité et la sécurité de l’emploi marque fortement le pas. En 2021, le pourcentage de collectivités confrontées à de fréquentes difficultés de recrutement avait retrouvé son niveau de 2019 pour s’établir à 39 %. En un an, ce taux vient de bondir de 20 points pour atteindre un taux historique de 60%.
La situation est particulièrement marquée pour les intercommunalités (72 %) et les conseils départementaux et régionaux (72 %). Et c’est surtout dans la filière technique que les difficultés sont les plus présentes (66%).
Les difficultés rencontrées par les employeurs territoriaux sont notamment dues aux niveaux de rémunération jugés insuffisants par les candidats pour certains postes, à une plus forte concurrence du secteur privé sur certains métiers et à des profils de candidats non adaptés aux postes proposés.
Parvenir à “recruter sur des postes et des profils en tension” arrive ainsi en seconde position dans les priorités RH chez 89% des répondants, 39% ayant même qualifié cette action de priorité principale.
Investir sur les conditions d’exercice pour améliorer l’attractivité
Pour renforcer l’attractivité de la fonction publique et susciter plus de candidatures, les collectivités estiment qu’il est certes important de mettre en place une politique de rémunération attractive pour le secteur, mais aussi nécessaire d’accorder une attention particulière à l’équilibre des temps de vie et aux conditions d’exercice de l’activité.
Le télétravail, important vecteur d’attractivité, trouve progressivement sa place dans les pratiques des collectivités territoriales. En 2021, 12% des collectivités avaient eu recours au télétravail pour garantir une qualité de service dans les meilleures conditions possibles. Début 2022 elles ont été 33%. A date, 39,5% des employeurs locaux déclarent maintenir un volant d’activités en télétravail, dont 85% dans le cadre d’un accord négocié avec les représentants du personnel (94% dans les Conseils départementaux et régionaux).
La formalisation de ces accords acte la pérennisation du télétravail dans la fonction publique territoriale et apporte une réponse pertinente aux aspirations croissantes des agents à de nouvelles formes de travail, selon les nécessités des services publics locaux.
« L’année 2022 met en lumière la réussite liée aux efforts opérés par les collectivités pour maintenir la continuité des services tout en préservant le climat social. La revalorisation du point d’indice a certes joué un rôle positif, mais ne semble pas suffisante pour concurrencer l’attractivité du secteur privé. Il est donc urgent d’ouvrir un chantier au long cours afin de restaurer l’attractivité des collectivités. Employeurs publics locaux et État en détiennent conjointement la responsabilité et les clefs du succès » résume Aline Crépin, Directrice Innovation sociale et Affaires Publiques du Groupe Randstad France
Enquête administrée en ligne par la Gazette des Communes entre le 9 mai 2022 et le 10 juin 2022 auprès d’un fichier qualifié de responsables de collectivités (élus, postes de direction générale et d’adjoints, directions des ressources humaines, secrétaires généraux et secrétaires de mairie). 568 réponses exploitées : 139 petites communes (moins de 5 000 habitants), 181 communes moyennes (de 5 001 à 50 000 habitants), 28 grandes communes (plus de 50 001 habitants), 165 EPCI (établissements publics de coopération intercommunale), 55 conseils départementaux et régionaux.